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  • : Créé en 2006, ce blog rédigé par Valérie Beck autrefois consacré à la danse et à ma compagnie se diversifie davantage.
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Noureev

 

Danser, telle la phalène sous la lune, le pinceau du calligraphe, ou l'atome dans l'infini 

                                              

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6 janvier 2018 6 06 /01 /janvier /2018 18:17

Ce Don Quichotte fut un beau gâchis de talents, presque tous à contre emploi, à commencer par les rôles titres, trop timides pour s'emparer pleinement de leurs personnages; Heymann est un Basilio souriant  à la danse moelleuse et élégante, mais nullement le barbier virevoltant, fougueux et virtuose! Sa danse est belle, tous ses pas se finissent proprement, mais malheureusement, on ne sent jamais l'enthousiasme que suscite ce personnage habituellement; sans même comparer à Patrick Dupont Nicolas Le Riche, ou même encore Bujones ( mon tout premier Basilio en 1981), si je m'en tiens à Paquette ou Alu,  je revois le premier drôle, vivant, chaleureux, l'autre mangeant toute la scène qu'il emplissait de sa générosité et de sa fougue, qualités vraiment absentes ce 30 décembre; se délecter d'une belle danse, élégante et accomplie et d'un visage souriant pendant deux heures en attendant que le personnage surgisse enfin,  finit par lasser.
La Kitri de Ould Braham, est jeune fille de bonne famille, qui fait souvent la tête, mais jamais  la  jeune espiègle de Barcelone, fille d'un aubergiste,  qu'on voudrait avoir pour copine ( Pagliero) qui n'a pas peur de se frotter au monde de la rue, a le verbe haut et met tout le monde dans sa poche. Ces deux là ensemble auraient été mieux séparés pour ce ballet : elle  aux côtés de F. Alu a été une Nikya inoubliable;  Bélingard,ou Paquette lui réussiss(ai)ent bien ;   lui aurait sans doute été parfait avec Pagliero ; l’équilibre aurait sans doute été trouvé.

Qu'on ne s'y trompe pas : j'adore ces deux artistes, les articles sur ce blog peuvent l'attester; Ould Braham est ma plus belle  Nikya, et dans Agon cet automne, elle m'a subjuguée; quant à Heymann, de Mcgregor à son inoubliable Lensky en passant par Lucien, de Paquita ou son époustouflant Roméo d'il y a deux ans, sans parler de son solo du prince Désiré, ou de son Prince dans Giselle, etc, etc...c'est un magnifique danseur et artiste... rien à redire. Il me semble que ces deux artistes auraient donc gagné à ne pas danser ensemble pour trouver dans un autre partenaire le feu qui leur a manqué.

Côtés seconds rôles, l’ Espada d'A Raveau, disparaît  sous sa cape, il manque de panache ou d'autorité ( et pourtant lui aussi quel artiste!) La danseuse des rues   d'Hannah O Neil, évoque une jeune fille de bonne famille qui a chipé la garde robe de sa camériste et s'amuse à s'encanailler sans y parvenir... Sa danse est splendide, brillante, mais "elle n'a pas l'accent!"  C’est le petit peuple que Noureev a mis en scène, que diable, pas des princes, des princesses ou des pierres précieuses !
Quand au trio qui d'habitude m'amuse beaucoup  ( sancho pança, Gamache et Lorenzo, à savoir Le Roux, Gaillard, et Murez) ils ne m'ont pas arraché un sourire. N'est pas drôle qui veut! Où est la bonhomie du vieux Don Quichotte perdu dans ses étoiles? La tendresse tapageuse et le sang vif de Lorenzo ( qui ne parle que sur un ton, celui de la brutalité).  Gamache n'est plus un  personnage ridicule, mais rend le danseur ridicule. La pantomine, grossière, ne raconte rien du tout ; d’ailleurs personne ne raconte rien dans ce ballet pourtant si bavard. On voit que Rudolf n’est plus là depuis 25 ans, le sens des choses et des pas se perdent peu à peu.

Et puis où est passé le corps de ballet? La place était clairsemée, vide, sans vie, trop chaud sans doute? Ou bien ils sont tous sur Play? Quelle tristesse que cette grande place vide sur laquelle on fait semblant d’être joyeux sans trop y croire.

Le deuxième acte n'est pas mieux; entre une scène de gitans trop sombre,  - sans doute pour cacher la mollesse des ensembles, -   une reine des dryades ( Sae Eun Park) qui s'entraîne pour les championnats olympiques de gymnastique, et une Ould Braham qui passe sa variation à la moulinette.... où est le rêve? Nulle part,  surtout avec les pauvres dryades survitaminées, qui ont des lignes de bras affreux et un bas de jambes qui évoquent plus des canards boiteux que des êtres irréels; de plus, j'ai été affligée par la transformation des pas gitans qui n'ont plus rien à voir avec la chorégraphie d'origine ( épaule, tête, vibration des mains, rien n'est juste) même avec ceux d'il y a cinq ans, qui déjà avaient été bien amolli; le chef gitan, Paul Marque, ne brille pas par son charisme ni pas sa technique.

Au troisième acte, on s'ennuie ferme…. Tout ce bruit pour rien….Au milieu de ce naufrage, quelques lumières du côté des amies, avec les très lumineuses Westermann et Giezendanner qui apportent leur bonne humeur et leur complicité.
Et puis Lydie Vareilhes  en Cupidon qui me tire tout à coup de ma torpeur pour quelques rares minutes trop vite écoulées!

D'ailleurs, dans la salle, j'ai vu plus d'une personne regarder ses textos sur son écran... cela en dit long! Quand on s’ennuie au point de regarder son téléphone toutes les dix minutes...

En conclusion, un Don Quichotte surjoué, dans lequel personne ne comprend ce qu'il danse.
Reverrai-je jamais ce ballet si joyeux, si virevoltant, dont on sort le cœur en fête comme à sa création ? On a souvent critiqué Noureev chorégraphe ; on oublie qu’avant toute chose, il était non seulement un danseur qui communiquait sa ferveur à tout un plateau mais surtout,  un merveilleux metteur en scène, sachant exactement comme tirer le meilleur de chacun, même des petits rôles, pour donner vie et authenticité à tous ces personnages de Barcelone.

Je suis ressortie triste, ayant eu l'impression d'avoir perdu temps et argent.

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